L’écologie, bonne pioche ! – Le jeu Héros et héroïnes de l’écologie


Un jeu de cartes met en lumière les défenseurs des écosystèmes

Outre les essais qui constituent le gros de leur catalogue, les éditions Libre publient régulièrement des… jeux de cartes. Une approche ludique destinée à mettre en lumière certains pans méconnus de l’Histoire, tels que les mouvements féministes en France et dans le monde, les figures de l’anti-colonialisme, ou les peuples autochtones. À vrai dire, ludique n’est sans doute pas le bon mot ! Le contenu du paquet ne comprend pas de règle du jeu ; les symboles trèfle, pique, cœur et carreau figurent discrètement dans un coin, permettant certes de faire une partie de belote, mais l’essentiel n’est pas là. En revanche chaque carte présente au recto l’image d’une personnalité ou d’un collectif, avec un court texte informatif au verso. De quoi donner envie, à chaque pioche, de se ruer sur la bibliothèque la plus proche ou un moteur de recherche pour connaître les détails de leur action. Car ce support tout simple souligne l’ampleur, la vitalité et la récurrence des résistances à l’oppression à travers les décennies, malgré la dureté de certains sujets.

Photo du paquet de jeu avec le paquet de cartes à côté, représentant un poing serré


Des risques qui s’aggravent avec les crises

La dernière parution présente en 54 « cartes éclair »des héros et héroïnes de l’écologie, « qui ont vaillamment lutté contre des projets industriels écocidaires, souvent au péril de leur propre vie ». Rémi Fraisse par exemple, jeune botaniste mortellement touché par une grenade tirée par la police française en 2014, sur le site de Sivens ou il protestait contre un projet de barrage dans le Tarn. Ou Dian Fossey, primatologue américaine ayant consacré son existence à la défense des gorilles du Rwanda et leur habitat. La scientifique est morte assassinée en 1985, du fait de son engagement. Comme un nombre croissant de militants écologistes à travers la planète : selon le rapport de l’ONG Global Witness paru l’année dernière, au moins 196 défenseurs des droits fonciers et environnementaux ont été tués en 2023. Une agressivité de plus en plus létale se développe contre les lanceurs d’alerte et les personnes qui tentent de mobiliser le savoir et l’information sur les atteintes aux écosystèmes. L’Observatoire de l’UNESCO des journalistes assassinés fait état d’au moins 44 meurtres de journalistes couvrant l’environnement au cours des 15 dernières années, et 70 % ont subi des attaques liées à leur travail.

Être présent sur le territoire

Le jeu présente des individus ou des collectifs résolus à défendre les espaces naturels les plus précieux de la Terre. Ceux qui fourmillent de biodiversité, dont font partie, bien-sûr, de nombreuses forêts. L’occasion, pour qui ne la connaît pas, de découvrir Julia Hill, dont les éditions Libre avaient publié le témoignage en 2020, De sève et de sang. Entre 1997 et 1999, la jeune femme a occupé la cime d’un séquoia millénaire dans le massif de Headwaters en Californie, pour le protéger de l’exploitation forestière. Un engagement physique que l’on retrouve en Inde, vingt ans plus tôt, lorsque le Mouvement Chipko, incarné principalement par des femmes, enlaçait les arbres menacés par les tronçonneuses, dans la région himalayenne. Ou chez les Wet’suwut’en, peuple autochtone canadien qui s’oppose depuis 2010 à un projet de gazoduc menaçant de polluer son territoire ancestral. Car pour obtenir des résultats, la dimension affective qui relie les humains à un territoire est essentielle : comme le dit souvent Francis Hallé, on défend avec vigueur ce que l’on connaît bien et que l’on aime.

Quelques cartes à jouer sont étalées sur une table, illustrées de photographies de personnalités engagées en faveur de l'écologie

La culture à la rescousse

La pertinence de ces cartes est de souligner, aussi, l’importance d’agir sur le plan de la culture et des idées. Y figurent des artistes comme Hayao Miyazaki, dont les films d’animation, particulièrement Nausicaä de la vallée du vent (1984) et Princesse Mononoké (1997), abordent la thématique de la destruction environnementale avec une puissance évocatrice inégalée. Le philosophe Henry David Thoreau (1817-1862), auteur de Walden ou la vie dans le bois, est un Joker, les théoriciens de l’écologie politique Bernard Charbonneau et Jacques Ellul se partagent un 6 de carreau, tant leur pensées sont complémentaires. Par ailleurs, si l’on retrouve dans le jeu des figures très médiatiques comme Vandana Shiva, une carte célèbre les héros et héroïnes de l’ombre : « Si il existe effectivement des hommes et des femmes dont la personnalité et les actions sont hors du commun, voire extraordinaires, est-il écrit au dos, les luttes et les révoltes sont toujours rendues possibles par des groupes ou des communautés, composées d’individus très souvent ignorés, voire effacés des grands récits. »


Gaëlle Cloarec, le 8 novembre 2024

Héro-ïne-s de l’écologie
Barnabé Crespin-Pommier, Louise Pachurka, Lysiane Mangin, Kevin Haddock, Élise Daquo
Volume 1
Éditions Libre, 2024
11€

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